Exposition Richard Pak « La Firme » > 24 oct. 2024 – 5 janv. 2025 – Fermetures exceptionnelles à 16h les 24 et 31 décembre.

Du mardi au dimanche de 11h à 18h au 58 allées Charles de Fitte (nouveau lieu pendant la durée des travaux).

Thomas Boivin, « Belleville »
Crédit : Thomas Boivin

Thomas Boivin, « Belleville »

  • Exposition
  • Lieu Galerie le Château d'Eau
  • Public
    • Tout Public
    • À partir de 5 ans

Thomas Boivin photographie avec affection son quartier de Belleville à Paris dans le XIXe arrondissement.

En alternant portraits, paysages et natures mortes, toujours en noir et blanc, il apporte une touche poétique à son travail, tout en s’éloignant des archétypes du réalisme poétique du Paris des années 50.

Le Belleville de Thomas Boivin

Pour les amateurs de photographie Belleville évoque immédiatement un livre, le Belleville Ménilmontant de Willy Ronis, publié par la maison Arthaud en 1954 avec une préface de Pierre Mac Orlan, somptueusement imprimé en hélio comme il se doit. Ce parcours dans un Paris populaire du XIXème arrondissement de la capitale menant des hauteurs vers la place de la République et qui fut depuis toujours terre d’accueil de nombreux immigrés et lieu de métissage illustre bien l’approche visuelle qui prédominait à l’époque. Terrain de jeu de nombreux photographes, à commencer par Robert Doisneau, Marcel Bovis ou René Jacques il fait partie de l’imagerie d’un Paris immortalisé par une « école française de photographie humaniste » des années cinquante regardée aujourd’hui avec d’autant plus de nostalgie qu’il n’est définitivement plus.

Si le quartier, qui était en très mauvais état avec de nombreux îlots insalubres à l’époque où les pionniers l’arpentaient, a été largement rénové, il reste très animé, espace de mixité et espace de rencontres possibles. C’est ce que prouve aussi le travail de Thomas Boivin dont on
perçoit immédiatement qu’il a été mené au rythme lent du marcheur en quête de rencontres, de lumières, de matières, d’espaces à cadrer.

Un marcheur aux aguets mais qui ne vole aucune image, un marcheur prêt au dialogue pour tenter de réussir un portrait souvent énigmatique, un marcheur dont la chambre photographique est la complice en dialogue avec la lumière.

Thomas Boivin n’est ni journaliste ni documentariste. Il dresse par petites touches le portrait de son Belleville. Celui qu’il vit et ressent au gré de ses déambulations quotidiennes et des rituels qui sont les siens. Il n’a rien à voir avec la tradition de l’anecdote qui continue à séduire
chez les photographes des années cinquante. On le rapprocherait beaucoup plus volontiers d’une photographie américaine contemporaine qui se confronte au réel sans se préoccuper de présupposés d’objectivité et qui rend compte de l’émotion – contenue – d’un instant, d’une rencontre, de la surprise devant une forme, devant un « petit rien ». La finesse sensuelle des gris de ses tirages, qu’il réalise lui-même, permet de faire partager ces moments légèrement étranges et qui touchent et font rêver. La plus grande force de la poésie réside souvent dans le fait qu’elle est contenue.

Christian Caujolle, Conseiller artistique

Le XIXème arrondissement de Paris est « bourré de détails comme un roman » écrivait Léon Paul Fargue en 1951. Le préfacier des plus illustres ouvrages de photographies d’après-Guerre revendiquait alors son attachement à cet ancien faubourg, maintes fois arpenté et documenté par des auteurs, fameux, comme Robert Doisneau, Willy Ronis, Marcel Bovis ou encore René-Jacques.

Le Belleville de Thomas Boivin puise ses origines dans cette tradition-là : une même prédilection – disons-le, un même talent– pour le noir et blanc, un goût pour la déambulation dans les rues parisiennes mais surtout, une affection particulière pour ce quartier composite et populaire du XIXème arrondissement.
L’analogie avec l’histoire de la photographie française s’arrête néanmoins ici. Car c’est davantage en l’oubliant qu’en s’y référant que Thomas Boivin a pu réaliser son « portrait » de quartier alternant figures humaines, paysages et signes urbains. Sa façon de voir les choses s’inspire davantage de la photographie américaine et d’auteurs comme Mark Steinmetz, Robert Adams ou encore Judith Joy Ross qu’il cite volontiers. Et il est vrai que ses photographies illustrent une relation au monde et une expérience intime qui ont peu à voir avec l’image du Paris, pittoresque ou anecdotique, véhiculée depuis près d’un demi-siècle.
Le périmètre de son Belleville est d’ailleurs une affaire personnelle. Il dépasse les limites traditionnelles et convenues pour rayonner sur une large part du Nord Est parisien. Celles et ceux qui connaissent les hauteurs des Buttes Chaumont, le bas Belleville ou la foisonnante agora de la Place de la République, ceux-là reconnaitront peut-être des endroits, les savoureux détails dont parle Léon Paul Fargue. Les autres y liront une autre forme de récit qui relève de l’immersion et de l’impression, qui sonde l’atmosphère d’un décor hétéroclite et insouciant, rapporte des façades désordonnées, des recoins aux allures de friches et signale des présences végétales plus ou moins domestiquées, plus ou moins exubérantes

pas de topographie descriptive, pas de légendes ni de narration, plutôt un vocabulaire de formes, de textures et d’ombres. Comme l’explique le photographe lui-même, ses images sont davantage avec et dans Belleville plutôt que sur Belleville.
La démarche de Thomas Boivin combine rituel et intuition. Le rituel, c’est l’habitude prise, année après année, de marcher avec son appareil dans les rues de Belleville puis de poser quotidiennement sa chambre photographique, là où les gens descendent et se rejoignent, sur la Place de la République. L’intuition, c’est la manière de comprendre l’ordinaire, le quotidien qui habite et anime cet environnement. Les personnages photographiés – des passants, des habitants – semblent profiter de ce décor, s’y fondre aussi. D’autres, au contraire, s’en détachent. Dans les deux cas, les physionomies s’exposent sans artifices et sans faux semblants. Il n’y a pas de passage en force, juste une franchise réciproque entre celle ou celui qui se trouve devant l’objectif et l’auteur derrière son appareil. Thomas Boivin ne se dissimule pas, il sait approcher ses semblables et établir la distance appropriée : à l’intelligence des lieux, s’ajoute chez lui l’intelligence des autres et de la rencontre.
La douceur de ce contact humain, lisible dans les regards, visible dans les attitudes, interpelle autant qu’elle réjouit. Elle bat en brèche l’idée qu’il serait devenu difficile de photographier ses contemporains dans l’espace public : le Belleville de Thomas Boivin redonne ainsi vie à la photographie de rue.

Michaël Houlette, Directeur de la Maison Robert Doisneau, Gentilly.

Thomas Boivin, Belleville

Interview de Thomas Boivin, le 12 juillet 2023

BIOGRAPHIE DE L’ARTISTE

Thomas Boivin est un photographe français né à Paris en 1983.

Travaillant principalement en monochrome, Thomas Boivin documente les rues de Paris et de sa banlieue avec un sens aigu du portrait. Son travail comprend aussi des natures mortes et des photos plus intimes de sa famille immédiate. Son dernier livre, Belleville, a été publié par Stanley/Barker en avril 2022, accompagné d’une exposition à la Fondation A. Stichting. Son prochain livre, Ménilmontant, paraîtra aux éditions Stanley/ Barker à l’automne 2023. Son travail peut être vu dans les collections de Neuflize OBC, la Collection Bachelot, Paris Collection, La Bibliothèque Nationale de France et la Fondation A Stichting.

L’exposition a été initialement coproduite par la Fondation A Stichting et la Maison Robert Doisneau.

La presse en parle

  • La photographie de rue est à l’honneur à la Galerie Le Château d’Eau. Avec son exposition « Belleville », Thomas Boivin nous propose un portrait de son quartier parisien autant qu’un hommage aux photographes du réalisme poétique des années 1950. A découvrir à Toulouse jusqu’au 27 août 2023.
    Article de Baptiste Thery-Guilbert pour Phototrend

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