Exposition Richard Pak « La Firme » > 24 oct. 2024 – 5 janv. 2025
Du mardi au dimanche de 11h à 18h au 58 allées Charles de Fitte.
Mars 2023 à la bibliothèque
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1 mois – 1 thème
Slava Ukraini ! Si le dossier du mois n’a pas la prétention « d’arrêter les tanks avec des livres » comme le désire le photographe anglais Mark Neville, celui-ci permet modestement d’offrir un état des lieux de la guerre russo-ukrainienne par différents photographes. Ainsi Guillaume Herbaut raconte ce pays cher à ses yeux depuis plus de 20 ans, de la catastrophe de Tchernobyl aux récents événements. Émeric Lhuisset était également allé à Kyïv sur la place Maïdan dès 2014 immortaliser la révolte pleine d’espoirs des ukrainiens, et qui lançait le véritable début de la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Cette sélection permet aussi de mettre en valeur le métier à risques de photographe de guerre, qui a permis notamment de faire connaître au monde entier la tragédie de Marioupol.
Guillaume Herbaut, Ukraine terre désirée, Textuel, 2022
Le photographe français Guillaume Herbault s’intéresse depuis 2001 à l’Ukraine, pays qu’il aime. Ukraine terre désirée résume ses 20 ans de reportages, de l’invasion du Donbass jusqu’aux récents événements. Fasciné par l’Est depuis longtemps, ce photojournaliste primé était parti dès 1999 en Biélorussie documenter l’embrigadement d’enfants dans une école militaire, puis en 2001 à Tchernobyl rencontrer les déplacés de la zone interdite dans la banlieue de Kyïv (« Tchernobylsty »). La première partie du livre couvre la période 2001-2012, incluant la « Révolution Orange » (500 000 manifestants à Kyïv et à travers le pays pendant une quinzaine de jours fin 2004) renversant le pro-russe Viktor Ianoukovytch au profit du pro-européen Viktor Iouchtchenko. Ce dernier restera au pouvoir jusqu’en février 2010, laissant sa place à Viktor Ianoukovytch. S’ensuit la Révolution de Maïdan (ou Révolution de la Dignité, cf plus bas).
La période 2016-2022 voit le conflit russo-ukrainien dans le Donbass (est de l’Ukraine) se transformer en guerre. En avril 2016 c’est l’élection du président Volodymir Zelensky, puis le déclenchement de l’invasion russe le 24 février 2022. Les extraits du carnet de route de Guillaume Herbaut complètent ses images documentaires : « 19 mai 2022, Boutcha. Rue Ivana-Franka. Il y a un peu plus d’un mois, les Russes occupaient la ville. La rue était jonchée de cadavres. Mains arrachées. Balles dans la tête. Aujourd’hui on ne voit rien. Il y a des maisons détruites, des gens qui nettoient, qui reconstruisent les murs des jardins. Une femme ratisse son potager autour des restes d’une voiture écrasée par un char (…) »
Guillaume Herbaut, De Maïdan au Donbass, CDP éditions, 2014
Le livre raconte les événements survenus de la fin 2013 jusqu’au mois de mai 2014. En novembre 2013, le président pro-russe Viktor Ianoukovitch refuse de signer l’accord d’association avec l’Union Européenne. Des centaines de milliers de manifestants pro-européens se retrouvent dans le centre de Kyïv et sur sa place Maïdan, rebaptisée pour l’occasion « Euromaïdan ». Il s’ensuit une répression violente des autorités et la fuite en Russie du chef de l’Etat ukrainien corrompu, puis de la riposte poutinienne, qui envahit la péninsule ukrainienne de Crimée en février 2014. Le 7 avril commence la guerre du Donbass, opposant Kyïv et les pro-russes. L’ouvrage témoigne de la violence meurtrière de ces manifestations dans les rues enneigées de la capitale ukrainienne, avec des clichés de barricades pro-européennes ou de miliciens pro-russes armes à la main. Les forces de l’ordre vont tirer à balles réelles, prenant même pour cible les journalistes. Ces manifestations à Kyïv vont provoquer le début de la guerre entre les deux pays.
Émeric Lhuisset, Maydan – Hundred portraits, André Frère Éditions, 2014
Avec ce livre le photographe français Émeric Lhuisset propose de voir les visages de ceux et celles qui ont fait la Révolution de février en 2014. L’auteur a profité d’un moment suspendu : Yanoukovitch est en fuite vers la Russie, la police n’est plus là, laissant pour un court instant le pouvoir au peuple dans les rues de Kyïv. Il a posé les mêmes questions à ces cent personnes : » Qu’aimeriez-vous qu’il se passe maintenant ? » Et « Que pensez-vous qu’il va se passer ? ». Ils défileront devant son objectif un par un, place Maïdan, avec comme fond de ce studio ambulant improvisé une porte en tôle en partie calcinée. Des portraits en couleur grand format qui racontent les espoirs et les peurs du peuple ukrainien, venu défendre courageusement son indépendance et sa liberté.
Textes d’Adrien Goetz et des révoltés de la place Maïdan. Langues : français, anglais, ukrainien, russe, allemand et hollandais.
Revue 6 mois n°24, hiver 2023
La revue propose un long dossier intitulé « Mémoires vives », consacré à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Celui-ci aborde plusieurs facettes : photos emblématiques de la guerre parues dans la presse et analysées par une sémiologue (Mariette Darrigrand), reportage de guerre de la photographe polonaise Justyna Mielnikiewicz et du photojournaliste français Lucas Barioulet sur l’enjeu des céréales ukrainiennes, etc. 6 mois propose également les images du russe Alexander Anufriev mettant en scène les défilés militaires, cours d’éducation patriotique et manifestations nationalistes participant à l’embrigadement d’une population fière de son armée et de sa puissance.
Revue Polka n°60, janvier-mars 2023
En couverture du dernier numéro de Polka, une chronique d’une année de guerre par le photographe ukrainien Maxim Dondyuk (né en 1983). Outre ses photographies que nous vous invitons à découvrir, il y exprime une réflexion sur le photojournalisme. Il explique avec lucidité ce que peuvent les images et pourquoi il poursuit un travail personnel plus libre que les photographies de presse. L’artiste a reçu le prix Polka du photographe de l’année 2022. Suivre Maxim Dondyuk sur Instagram : @maximdondyuk ou sur son site internet : Maxim DONDYUK
Festival Visa pour l’image, édition 2022
Le festival de photojournalisme perpignanais a consacré plusieurs expositions à la guerre russo-ukrainienne lors de sa dernière édition, avec notamment celle de Mstyslav Chernov et Evgeniy Maloletka, de l’agence Associated Press (AP) sur le bombardement de la maternité dans la ville de Marioupol. Ils furent pendant 20 jours le seul média international à rendre compte de cette tragédie qui allait choquer le monde entier, et révulser le Kremlin, qui allait qualifier par la suite leur reportage de « fake news ». Une vidéo, tirée d’un film documentaire à venir, Vingt jours à Marioupol, fut projetée au festival, décrivant toute l’horreur de ce bombardement aveugle d’un bâtiment destiné à donner la vie.
Mark Neville, Stop tanks with books, Nazraeli Press, réédition 2022
Le photographe anglais Mark Neville documente depuis 2015 la vie quotidienne ukrainienne et s’est installé en 2021 à Kyïv. Outre de nombreux portraits de soldats (hommes et femmes), Neville a également immortalisé un été de presque insouciance en 2017 à Odessa : des familles paressent en bord de mer, tandis que des adolescents en maillot de bain utilisent leurs perches à selfie face à des grands-mères en goguette à la peau hâlée. Il a également photographié des soirées techno rave en 2021 organisées à Kyïv par le collectif Rhythm Büro, des mineurs de Luhansk (2019), ou bien encore des élèves d’une école pour enfants sourds à Zhytomr (2016). Les photographies sont accompagnées de 5 nouvelles de la romancière ukrainienne Lyuba Yakimchuk sur la vie dans le Donbass sous occupation russe, et de recherches du Centre d’études de l’Europe de l’Est de Berlin (ZOiS) sur les 2,5 millions d’Ukrainiens déplacés par la guerre en 2018.
« Fabriquer et disséminer Stop tanks with books, c’est ma tentative à moi pour contrer l’agression russe. Avant la guerre, j’ai offert 750 livres à un public soigneusement sélectionné : diplomates, personnalités politiques, négociateurs de paix, membres de l’UE et de l’OTAN – en somme, tous ceux qui avaient, à mon avis, le pouvoir d’aider l’Ukraine« . (entretien pour Vogue France, 1 mars 2023). Prix du Livre Paris Photo – Aperture Foundation 2022
Karine Zenja Versluis, Debaltsevo, where are you ?, The Eriskay Connection, 2023
Dans cet ouvrage la photographe hollandaise Karine Zenja Versluis entreprend une quête d’identité dans la ville de Debaltseve (Donbass, Ukraine), ville natale de sa grand-mère. Cette dernière, née en 1921, a été contrainte de quitter Debaltseve et de travailler dans un camp de travail allemand pendant la Seconde Guerre mondiale. Après la Libération, elle s’installe en Hollande et construit une famille, oubliant sa vie ukrainienne d’avant-guerre. Karine Zenja Versluis décide de partir en 2017 dans le Dombass, à Kostiantynivka, Zaporizhzhia et kharkiv, pour tenter de reconstruire le passé. Ce périple, documenté par ses carnets de route, nous fait rencontrer trois familles ukrainiennes qui ont fui la ville de Debaltseve en 2015, et en 2022, pour une autre guerre, plus proche de nous celle-ci. L’œuvre se compose d’images d’archives, de photographies de l’auteure et de textes en anglais, avec une traduction néerlandaise et ukrainienne disponible en ligne.
Dernières acquisitions – femmes photographes
A l’occasion du mois de mars de l’égalité Femmes-Hommes, la bibliothèque vous propose un choix d’ouvrages de femmes photographes, notamment The other end of the rainbow de la photographe canadienne Kourtney Roy sur les féminicides irrésolus de la « highway 16 » , et le second volet de « L’histoire de la misogynie » de l’activiste barcelonaise Laïa Abril, intitulé « On rape », sur la culture du viol dans l’histoire de la société.
Kourtney Roy, The other end of the rainbow, André Frère Éditions, 2022
La Highway 16 au nord de la Colombie-Britannique est tristement célèbre : pendant près de 50 ans de nombreuses femmes, la plupart issues des communautés des Premières Nations du Canada (autochtones), ont disparues ou ont été assassinées. Ces féminicides perpétrés sur la « Highway of tears » (route des larmes) depuis 1969 sont en majeure partie non élucidés, la police canadienne n’ayant accordé que peu d’intérêt et de médiatisation à toutes ces disparitions. Kourtney Roy (Canada, 1981) a pris pendant 2 ans cette longue route (720 km), et est allée à la rencontre des familles des victimes, s’arrêtant sur les lieux des disparitions. Un récit photographique glaçant, alimenté par les paroles des proches ou les extraits du carnet de route de l’auteure qui, selon ses propres aveux, se sent au fur et à mesure de son voyage gagnée par l’angoisse et la paranoïa. Et comme elle l’ajoute, les disparus (qui comptent également des jeunes hommes) sont « tous avalés par les lieux » : les photographies en couleur montrent, outre des portraits des personnes rencontrées, des paysages de solitude enneigés, immense décor sauvage perdu tout au « bout de l’arc-en-ciel ». Quelques hameaux surgissent parfois au pied de montagnes brumeuses, ou des stations-service décaties le long de bandes de bitume sans fin. Une photographie documentaire inspirée, pour un voyage éprouvant.
Voir le livre sur le site de l’éditeur André Frère : «The Other End of the Rainbow» par Kourtney Roy | André Frère Éditions (andrefrereditions.com)
Laia Abril, On rape and institutional failure, Dewi Lewis Publishing, 2022
On Rape est le second chapitre du projet de Laia Abril (Barcelone, 1986) intitulé A History of Misogyny.
« En scrutant, conceptualisant et visualisant les échecs judiciaires, en tenant compte des réglementations historiques, des dynamiques toxiques et des témoignages de victimes, le projet pointe la culture du viol institutionnel répandue dans les sociétés du monde entier. Je développe ce travail en explorant les liens entre mythes, pouvoir et droit et les notions de masculinité et de violence sexuelle« . Cette artiste pluridisciplinaire articule son propos féministe par un ensemble de photographies d’objets en noir et blanc proche de l’inventaire, comme pour celles de vêtements symboliques tels que les uniformes de l’armée américaine, burka, robe de mariée, ou bien encore d’habits de religieuses. Des textes racontant la culture du patriarcat dans de nombreux pays et époques font face à ces images, les faits divers ou autres témoignages relatés rendant tous compte du contrôle du corps des femmes par une normalisation systémique des violences sexuelles. Son histoire documentaire de la misogynie est une trilogie débutée en 2015 par « On Abortion » (« sur l’avortement« ), et doit se poursuivre après « On Rape » par « On Mass Hysteria » (« de l’hystérie collective« ).
Nan Goldin, This will not end well, Steidl, 2022
Ce catalogue d’exposition (organisée par le Moderna Museet de Stockholm) donne un aperçu du travail de Nan Goldin en tant que cinéaste, en proposant diaporamas et installations vidéo réalisés à partir de milliers de photographies, depuis ses débuts jusqu’à aujourd’hui. Sa première monographie, The ballad of sexual dependency (également disponible à la bibliothèque en version originale) était un travail conçu pour être projeté sous forme de diaporama. Les quelques 700 diapositives étaient accompagnées de musique, comme en 1981 au Museum of Modern Art de New York, où elles défilaient avec une bande son mêlant entre autres Maria Callas et The Velvet Underground. Ce diaporama de 41 minutes est reconstitué dans l’ouvrage, tout comme la série « The other side » (1992, 16 mn), « All by myself » (1993, 6 min), etc. Il propose également les images d’une vidéo tournée en 2019, Sirens, ou Memory Lost, diaporama réalisé la même année. Des textes de différents auteurs (la plupart choisis par Nan Goldin) accompagnent chaque série d’images imprimées sur fond noir, comme si l’on visionnait ces slideshows. This will not end well s’approche donc au plus près de ce que désirait Nan Goldin, qui aurait voulu être cinéaste. En mars est sorti également un documentaire de Laura Poitras, « Toute la beauté et le sang versé », bande annonce à voir sur le site de Participant Media : All the Beauty and the Bloodshed | Participant
Collage, Woman of the Prix Pictet since 2008, Gestalten, 2022
L’ouvrage résume le travail des 64 femmes photographes ayant été nommées (ou ayant fait partie de la « short list ») pour le Prix Pictet, décerné chaque année à un ou une artiste dont le travail est consacré au thème du développement durable. Parmi les photographes présentées dans le livre figurent Mandy Barker et Polly Braden (GB), Joana Choumali (Côte d’Ivoire), première photographe africaine à avoir remporté le prix en 2019, la photographe azerbaïdjanaise Rena Effendi, la sud-africaine Alice Mann, mais aussi l’arméno-américaine Diana Markosian, etc. En 2021 c’est Sally Mann (USA) qui remporta le prix avec sa série « Blackwater« . Collage, outre sa thématique contemporaine, permet ainsi de découvrir de nombreuses photographes issues du monde entier. Pictet a annoncé aux Rencontres d’Arles 2022 le thème de la dixième édition : ce sera « Human », toujours axé sur les enjeux écologiques.
Classiques à voir ou revoir
Josef Koudelka, Ikonar Constellations d’archives, Photo Élysée, 2023
« Ikonar » (« faiseur d’icônes« ) est le surnom donné au photographe Josef Koudelka (Tchéquie, 1938) par un groupe de Roms qu’il a longuement fréquenté et photographié. Ce catalogue d’exposition couvre la période allant de 1960 à 2012, et offre de nombreux documents inédits, sélectionnés parmi près de 30 000 planches-contact 35 mm de ses archives. Cette partie de son œuvre, dévoilée par Koudelka à l’excellent musée suisse Photo Elysée, offre l’occasion de revisiter l’œuvre du grand photographe « humaniste » membre de l’agence Magnum, de par son processus artistique même. Ikonar se découpe chronologiquement en plusieurs portfolios allant de ses « Débuts et Expérimentations » (1958-1964), à « Exils » (1968-1994), en passant par des moments clés de son œuvre (traitant des gitans, ou de Mai 68). Un ouvrage important, notamment pour les connaisseurs à qui l’on ouvre des archives jusque-là inédites.
Françoise Denoyelle, Jean Mouniq – Portraits, Les Éditions de Juillet, 2022
Portraits offre, comme son titre l’indique, une collection de portraits de célébrités diverses réalisés par le photographe français Jean Mounicq (Pau, 1931). Ce dernier travailla pour la presse féminine, notamment pour le journal ELLE, collaboration qui dura jusqu’en 1974 et qui lança ce travail spécifique. L’ouvrage compile de nombreuses photos en noir et blanc issues des années 60, immortalisant acteurs, comédiennes, écrivains ou journalistes. Des portraits de commande de ceux et celles qui faisaient l’actualité à l’époque, comme Eugène Ionesco, Alexandre Calder, Joséphine Baker ou Zizi Jemmaire. Hélène Lazareff, directrice fondatrice de ELLE, définissait ainsi la ligne éditoriale du journal pour lequel il travaillait : « Du sérieux dans la frivolité, de l’ironie dans le grave« .
Penser la photographie
Benjamin Moser, Susan Sontag, Christian Bourgois éditeur, 2022
Cette imposante biographie de la philosophe, féministe, essayiste, romancière et cinéaste Susan Sontag (États-Unis, 1933-2004) a été récompensée en 2020 par le prix Pulitzer. Benjamin Moser raconte son enfance compliquée, la découverte de la Partisan Review, journal de l’intelligentsia new-yorkaise juive et socialiste, ses années universitaires, l’Europe et la bohème culturelle, ses voyages au Nord-Vietnam en pleine guerre, en Chine, à Sarajevo, etc., mais décrypte également les écrits (dont ceux sur la photographie). Tout un siècle d’idées défile avec elle et l’on est au plus près de cette intellectuelle complexe star de son époque. Le tout est alimenté par une somme d’archives, de documents et de témoignages inédits de proches. Parmi eux, sa dernière compagne, la photographe Annie Leibovitz (États-Unis, 1949). Traduit de l’anglais (États-Unis) par Cécile Roche. A consulter aux Éditions Christian Bourgois
Sally Mann, Tiens-toi bien !, mémoires avec photographies, Phébus, 2022
Tiens-toi bien ! est l’autobiographie de la photographe américaine Sally Mann (États-Unis, 1951), construite tout autant par des photos et archives personnelles inédites que par ses écrits. Cela se lit donc comme un album de famille, autant qu’un roman sur le deep south des États-Unis qu’elle affectionne tant, elle-même vivant toujours en Virginie. C’est le Sud, région construite par la guerre de Sécession (1861-1865) et le racisme envers le peuple noir qui la toucha profondément (Sally Mann fut élevée par une femme noire). Elle cite volontiers William Faulkner, toujours passionnée à la fois de littérature et de photographie, et fortement imprégnée de l’ambiance poisseuse des paysages marécageux si bien décrite par les écrivains Southern Gothic. Elle raconte une vie habitée par les fantômes du bayou, où mort et innocence se côtoient dans une œuvre élégiaque, et qui a fait l’objet d’une rétrospective au Jeu de Paume à Paris en 2019.
Une histoire de la photographie à travers les collections du musée Nicéphore Niépce, Textuel, 2022
Cet ouvrage traverse l’histoire de la photographie par les collections du musée Nicéphore Niépce, (créé en 1972 à Chalon-sur-Saône) et riches de 4 millions de photographies, 8000 appareils de prises de vues et 30 000 revues et livres techniques ou illustrés par la photographie. L’ouvrage débute par les premiers daguerréotypes de 1840 et autres inventions de la fin du 19ème siècle (ambrotypes, ferrotypes, premières photos en couleur, etc.), les revues et la diffusion des images. Il répertorie ainsi les dimensions sociales, documentaires et commerciales de la photographie depuis ses origines, mais aussi les différents courants artistiques ayant construit son histoire, jusqu’à aujourd’hui. Un ouvrage richement illustré et complet. Sous la direction de Sylvain Besson.
Jeune photographie
Jordanna Kalman, portfolio dan la revue Safelight Paper, « Youth« , numéro 1
Cette toute nouvelle revue berlinoise, en abonnement à la bibliothèque, propose de décliner un thème choisi par des portfolios d’artistes contemporains pratiquant la photographie analogique. C’est l’occasion d’apprécier le travail de Jordanna Kalman, jeune photographe vivant à New York (États-Unis), et qui pratique l’art de l’autoportrait performatif (comme dans la série « Little romances« ), mêlant dans ses images polaroids, natures mortes, collages. Il en résulte un univers intimiste étrange, légèrement inquiétant, évoquant les questions de féminité, de solitude émotionnelle et de perte mémorielle : « Je ne considère pas mon travail comme un journal intime, mais plutôt comme un marqueur chronologique qui reflète l’état dans lequel je me trouve dans ma vie« . Une photographie analogique peuplée de fantômes, et jouant souvent des effets de lumière.
Lieux photo. et éditions
1,2,3… Couleur !, l’autochrome exposée, album de l’exposition n°9, Jeu de Paume, 2022
En juin 1907, la Société Lumière commercialise le premier procédé industriel de photographie couleur : l’autochrome. Cette nouvelle technique, considérée à l’époque comme révolutionnaire, va être utilisée pendant près de 20 ans, puis finalement tomber dans l’oubli, au profit de la diapositive Kodachrome. Ce catalogue d’exposition déroule une partie de la collection AN réunie depuis 2006 par Soizic Audouard et Élisabeth Nora, et un fonds patrimonial de la Première Guerre mondiale. Les images colorées datant du début du dernier siècle offrent toutes une certaine étrangeté, comme si l’on apposait un voile pop sur des images en noir et blanc. Cette esthétique particulière en fait son attrait, et 1,2,3… Couleur ! rend hommage à cette technique faite de plaques de verre aux petits grains de fécules de pomme de terre teintés.
Exposition visible jusqu’au 28 mai 2023 au château de Tours.
Alexandra Catiere, À haute voix, Éditions Gwinzegal, 2022 « , numéro 1
Le centre d’art GwinZegal concentre ses activités autour de la photographie, et est implanté à Guingamp (Côtes-d’Armor). Il organise résidences d’artistes, expositions, et édite des livres de photographies. Le centre d’art est membre du réseau Diagonal.
Alexandra Catiere, À haute voix, Éditions Gwinzegal, 2022
Alexandra Catiere est une photographe française d’origine biélorusse cultivant la tradition du portrait. Pour ce projet spécifique, elle a installé son studio photographique dans des villages de la région de Guingamp. Elle définit sa pratique ainsi : »Ne se limitant pas à une recherche figurative, mes installations composent des fresques photographiques mêlant poétiquement des fragments de vie, subtilement autobiographiques ». À haute voix alterne en noir et blanc les portraits de villageois avec des images d’objets du quotidien, des fragments de nature, dégageant une poésie silencieuse, « semblant obéir à la grammaire d’une liturgie mystérieuse » (Jérôme Sother).
Les Éditions Sun/sun avec le musée Albert Khan
Sun/sun est une maison d’édition indépendante créée en 2015 par Céline Pévrier et basée à Montpellier. Elle a lancé une nouvelle collection nommée « Fléchette« , sous la direction d’Adrien Genoudet, où dialoguent des photographies issues des Archives de la Planète du musée Albert Khan avec des textes d’auteurs contemporains. La collection a été inaugurée le 13 décembre 2022 au Musée Albert Kahn, pour la parution des quatre premiers ouvrages de la collection. Chaque texte, qu’il soit un essai, un écrit poétique ou une nouvelle est inspiré par une autochrome que l’on trouve reproduite en début d’ouvrage en fac-similé.
- Philippe Artières, Le dos de l’histoire, avec pour point de départ l’autochrome du « Tatouage du fusilier marin Artufel représentant une scène de Sherlock Holmes (sic) de dos et assis« , 1917.
- Hélène Gaudy, Villa Zamir, 2022, avec « Un coin de la Villa (soleil couchant), angle nord-est de la villa Khan, dite villa Zamir et lumières du soir sur la mer« , 1910.
- Marie-Hélène Lafon, Où sont les hommes ?, avec « France, Saint-Flour, un char de foin attelé de deux vaches (bœufs), race d’Aubrac« , 1906
- Fanny Taillandier, Foudres, avec « Dahomey, Dassa-Zoumé, Orage sur la montagne de Dassa« , 1930.
Tous les ouvrages sont consultables à la bibliothèque du mardi au samedi de 13h à 18h